Tous ces êtres, là devant moi, ils sont parfaits, triés, sélectionnés, ils ne sont que des codes génétiques recensés dans un catalogue que l’on présente aux parents. Ils ne sont pas humains, ils ne sont pas normaux, je m’y refuse d’y croire. Ils n’ont aucun défaut, aucune maladie, et tous ces humains créés dans des laboratoires sont là pour éviter d’engendrer des monstres : nous. Généralement, les allèles sont distribués au hasard, cela donne un enfant dont on ne connais pas l’apparence, ni le caractère, ni les anomalies, et il y a nous : l’infâme risque de la mutation.
Nous sommes encore inconnus aux yeux du monde, nous n’existons plus, mais je suis presque sûre que notre secret a été percé par le gouvernement. C’est peut être une des causes de cette folie de l’idéal. Ces gènes renfermés en nous ne se manifestent qu’à partir d’un événement qui pourrait perturber notre ADN. Je ne sais pas vraiment quel à été cet événement, mais une drôle d’impression m’avait envahie soudainement. Je haïssais déjà ces créatures parfaites qui tentaient de se mélanger aux humains. Je les reconnaissaient à leur parents : ils étaient fiers d’eux tout le temps et créaient une famille parfaite, trop parfaite. C’était surtout parce qu’ils avaient choisit leur enfant…Un peu comme une machine, ils choisissaient parmi différents critères physiques et caractériels.
Maintenant je comprends mieux certaines choses, et la race que je hais le plus ce sont finalement les humains. Ces choses parfaites sont, à vrais dire, des monstres, tout comme nous, et l’origine de tout ça, c’est l’être humain.
Le clan s’est rapidement formé, nous ressemblions un peu à des adolescents en pleine crise face aux changements de notre organisme. Nous considérions comme une nouvelle race et pour l’instant, nous ne nous préoccupions uniquement de notre survie bien difficile.
-Tristana, tu ne dors toujours pas ?
La voix claire et douce d’Angèle me tira de mes pensées. Je jetais un rapide coup d’œil aux deux excroissances dans son dos, elle me sourit rapidement et se coucha contre moi. Encore une chose qui nous différencie de ces machines : nous au moins, nous avons des sœurs qui veillent sur nous. Pas eux. J’en viendrais presque à les plaindre.
La peau d’Angèle était froide et ses cheveux constellés de flocons. C’est étrange comme ces mutations accidentelles peuvent nous correspondre. A tel point que même notre prénom nous désigne tes que nous sommes.
L’enfant que je porte en moi auras un prénom qui ne veut rien dire, comme ça peut être, vivra t il normalement. Un enfant dont le prénom sera inexistant. Je me sentais étouffer ici, la porte à quelques mètres semblait me tendre les bras. Dehors, tout était blanc, même le ciel, tout était calme et la neige m’arrivait aux chevilles.
C’est alors que mon ventre énorme m’obligea à me plier en deux sous l’effet de la douleur. J’avais des contractions. Le bébé allait venir. Encore une autre contraction et je tombais à genoux. Personne ne m’entendait, ils dormaient tous tandis que moi, j’accouchais seule avec pour uniques connaissances qu’un documentaire sur le sujet. J’avais mal, je voulais tout abandonner, mais je volais aussi cet enfant, et finalement, je réussis à accoucher. Lorsque je me relevais péniblement pour couper le cordon et prendre enfin mon enfant, je ne vis qu’une grande étendue rougeâtre et quelques masses infâmes. Il y avait le placenta, cette espèce de chose difforme, je fouillai dans l’horrible bouillie et trouvai un petit cordon ombilical sanguinolent. Mais il n’y avait rien au bout. L’enfant était inexistant. De grosses larmes de sang roulèrent sur mes joues tachant la neige autours de moi. Et lentement, je me vidais de mon sang au rythme de mes sanglots.